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Textes, croquis et photos (sauf mention contraire) Claude Beaudevin (1928 - 2021) Présentation et mise en page Bruno Pisano 

  Certains mots à la signification spécifique sont écrits en bleu et soulignés en pointillés. Si vous laissez la souris dessus, une info-bulle affichera leur définition.

 
Le glacier du Paillon PDF Imprimer Envoyer
Écrit par Claude Beaudevin   
Vendredi, 26 Avril 2019 18:49
l'Version du 3 novembre  2019

Comme ailleurs dans notre site, nous avons utilisé le terme de Glaciation Maximum pour Most Extensive Glaciation ou MEG.

Et tout d'abord, pour convaincre les lecteurs qui refuseraient de croire à la présence de glaciers dans les Alpes-Maritimes au cours d'une glaciation ancienne, voici un argument qui, nous l'espérons, les convaincra : les Fers à Cheval du col d'Ambellarte, à une altitude d'environ 966 mètres, dans le nord du département, sous la Madone d'Utelle.

Le col d'Ambellarte dans les Alpes-Maritimes
Image sensible au passage de la souris
Le col d'Ambellarte dans les Alpes Maritimes (vue Geoportail)

Seule l'action d'un glacier peut être évoquée pour expliquer la formation de ces deux magnifiques formes en demi-cercle que l'on croirait tracées au compas, plus visibles en passant la souris sur la vue aérienne Géoportail ci-dessus. Ces formes d'une pureté géométrique soulignent les moraines frontales de deux lobes glaciaires très importants qui se faisaient face. Le diamètre du plus grand dépassait 600 mètres. Nous reviendrons, dans la suite de cette page, sur ces fers à cheval d'Ambellarte dont la formation présente la rare particularité de pouvoir être datée.

Tout au long de cette page, nous emploierons de préférence la notion de Glaciation Maximum, glaciation qui, selon nous, a joué un rôle essentiel dans la formation du relief actuel. Celle-ci est étudiée dans notre page sur la datation des glaciations quaternaires.

Le glacier du Paillon

Nous appelons ainsi :

      • le glacier qui, lors des anciennes glaciations, occupait la vallée du Paillon, cette rivière le plus souvent actuellement à sec, qui traverse la ville de Nice avant de rejoindre la Méditerranée,

      • ainsi que les vallées de ses affluents.

Ce glacier du Paillon, dont la surface, lors de la Glaciation Maximum, était de l'ordre de 250 km², sur une largeur de plus de 25 kilomètres à son arrivée dans la Méditerranée, occupait sensiblement toute la surface de l'ancien Comté de Nice. Le tracé de ce glacier se lit sur les cartes géologique :

Carte géologique de la Vallée du Paillon
Carte géologique de la vallée du Paillon

Légende sommaire de cette carte :

  • A, B : terrains éocènes et miocènes

  • C, D, F, G : terrains jurassiques

Une partie des glaces du glacier du Paillon pouvait échapper à l'étreinte des terrains jurassiques en empruntant, en B, un couloir de terrains éocènes et miocènes, large de 2500 m, qui débute à Saint-André (Alpes-Maritimes), traverse le Var, parvient à Cagnes-sur-Mer où il s'épanouit jusqu'à présenter une largeur de 4 à 5 kilomètres. Longeant toujours la mer, il est encore large de 5 kilomètres sur Villard-Loubet avant de se terminer près de cette cité.

Pour commencer, suivons le trajet de ces glaces, de B jusqu'à Villard-Loubet (Alpes-Maritimes), où elles confluaient avec celles du glacier du Loup en provenance du versant sud de la Montagne du Cheiron.

Le glacier du Paillon était une Â« nappe glaciaire de vallée »

En effet, du fait de sa surface importante et des nombreux sommets qui en émergeaient, le glacier du Paillon n'était pas un glacier de vallée habituel. Nous le rangeons dans une autre catégorie de glaciers, celle des nappes glaciaires caractérisées par une grande largeur, une grande superficie ainsi que par la présence de sommets émergeant de la surface glaciaire. Ce type de glacier est beaucoup moins répandu que les glaciers classiques de vallée, de largeur inférieure à deux ou trois kilomètres.

Dans le domaine étudié dans notre site, qui couvre les Alpes du Dauphiné et une partie des Alpes du Sud, nous avons identifié trois nappes glaciaires de vallée. Le glacier du Paillon constitue l'une d'elles.

Les nappes glaciaires des Alpes du Sud

Les nappes glaciaires de vallée des Alpes du Sud
A : nappe durancienne (Gap-Sisteron)
B : nappe de St Sauveur sur Tinée
C : nappe du Paillon qui nous occupe dans cette page.

Dans ces nappes glaciaires de vallée, le mode de circulation des eaux glaciaires diffère de celui que l'on observe dans les glaciers des vallées plus étroites, où les eaux glaciaires circulent principalement contre les versants, avant de pouvoir gagner le fond d'auge. Pour ce faire, elles utilisent des "points faibles" dans l'appui de la glace contre les versants, c'est-à-dire des endroits où, en dépit de sa plasticité, la glace n'adhère pas contre la roche des versants. On pourra consulter à ce sujet notre page sur l'écoulement des eaux glaciaires dans un glacier de vallée.

Nous bornant ici à l'essentiel, nous dirons que dans les nappes glaciaires de vallée certains sommets émergent de la surface glaciaire, dont les versants présentent, comme ceux des vallées plus étroites, de tels « points faibles » dans l'appui de la glace contre la roche. Une partie des eaux superficielles du glacier profite alors de l'existence de ces facilités de circulation contre les sommets émergents qui leur permettent de gagner le fond d'auge, plutôt que d'avoir à parcourir de longs trajets contre les versants de la vallée.

Dans ces nappes glaciaires de vallée, où l'érosion glaciaire est due principalement aux eaux qui coulent sur le fond d'auge, celle-ci s'attaque principalement aux roches tendres de celui-ci, en général, comme c'est le cas ici, des terrains éocènes et miocènes. Les terrains jurassiques, plus résistants, subsistent sur les côtés et sur le front de la vallée. Le résultat de cette érosion différentielle épouse une forme qui, bien que très grossièrement, évoque celle de la partie terminale d'un glacier, un lobe.

On dispose ainsi d'une première estimation du tracé du glacier du Paillon, information importante qui sera confirmée par d'autres méthodes dans la suite de cette page, mais évidemment estimation très grossière et qui, de plus, ne fournit aucune indication sur l'altitude atteinte par les glaces.

On peut remarquer toutefois que les terrains jurassiques, plus résistants, se disposent grossièrement selon trois arcs de cercle emboîtés, soit, du nord au sud :

      • le chaînon du Brausch, qui culmine à 432 mètres,

      • le chaînon du Plateau Tercier/Cime de la Caussinièra qui s'élève à 617 mètres

      • enfin le chaînon de la Grande Corniche qui atteint une altitude de 687 mètres et qui domine directement la mer à l'est de Villefranche-sur-Mer.

Les trois chaînons, ainsi que les vallées qui les séparent, se distinguent bien sur la carte en relief de Géoportail suivante :

L'examen de cette carte en relief, nous permet de voir que le chaînon du Plateau Tercier/Cime de La Caussinièra est disposé sensiblement en arc de cercle. Au sud de cet arc de cercle, un autre se dessine, le « chaînon de la Grande Corniche », qui s'étend du Fort de la Drête (520 m) jusqu'à la Simboula (626 m), puis à la cime de la Forna (621 m) et enfin au Mont de la Bataille (620 m), ainsi que nous le verrons plus loin dans cette page.

Les limites du glacier du Paillon et l'altitude de sa surface

La carte ci-après couvre l'aire géographique que nous avons étudié. Elle comprend l'aire glaciaire du Paillon ainsi que celle de ses principaux glaciers affluents nommés d'après les appellations des rivières d'aujourd'hui. Les flèches montrent le sens d'écoulement des glaces et le nombre qui y figure permet de les identifier dans la liste des affluents du glacier du Paillon.

Carte de l'aire glaciaire étudiée dans les Alpes-Maritimes

 Carte de l'aire glaciaire étudiée dans les Alpes-Maritimes
Image sensible au passage de la souris

Un clic sur cette carte permet d'afficher l'altitude de la surface des glaciers au-dessus d'un certain nombre de délaissés morainiques.

Ces altitudes, obtenues grâce à notre méthode des délaissés morainiques, sont celles atteintes au maximum du pléniglaciaire de la Glaciation Maximum.

Les glaciations suivantes, Riss et Würm, moins importantes, ont laissé peu de traces identifiables avec certitude dans les paysages et nous ne les avons pas étudiées.

Il faut en effet garder à l'esprit que la méthode des délaissés morainiques ne fournit d'une manière certaine que les altitudes atteintes lors du pléniglaciaire de la Glaciation Maximum, c'est-à-dire la glaciation du stade 16 sur l'Échelle chronostratigraphique du Quaternaire établie par les Universités de Cambridge et d'Utrecht. Nous avons cependant pu utiliser le relief du terrain dans les environs du Mont Chauve d'Aspremont, ce qui nous a fourni une altitude de l'ordre de 450 mètres, lors de la glaciation du stade 12 soit environ 150 m plus bas que lors de la Glaciation Maximum. Voir à ce sujet notre page sur Les séries de reliefs glaciaires : les vallons.

Enfin les chiffres figurant dans les flèches renvoient à la liste des affluents du Paillon ci-après. Car celui-ci recevait les apports suivants, énumérés en suivant le sens des aiguilles d'une montre :

      • l'apport des glaces du glacier du Var, repéré 1 sur la carte, lui-même grossi, un peu en amont, par le glacier du Cians (hors carte),

      • l'apport des glaces des glaciers de la Vésubie et de la Bévéra, repérés 2 et 3 sur la carte,

      • plus loin, une confluence avait lieu avec le glacier de la Roya, repéré 4 sur la carte ; nous verrons plus loin dans cette page dans quel sens elle avait lieu,

      • l'apport des glaces des petits glaciers (hors carte) descendant du versant ouest de la chaîne frontalière. Leur influence se traduit, dans les environs de Peille, par quelques valeurs d'altitude qui, à première vue, pourraient sembler étonnantes,

      • une autre confluence se produisait, à l'ouest du glacier du Var, avec le glacier nord de l'Estéron provenant du versant nord de la Montagne du Cheiron (hors carte),

      • enfin, le glacier du Loup, né sur le versant sud de la Montagne du Cheiron (hors carte), dans le Parc National Régional des Préalpes d'Azur que, nous le verrons plus loin, nous considérons comme un affluent du glacier du Var.

Pour être complet, on pourrait ajouter à cette liste le très faible apport du glacier du Mont Férion auquel nous consacrerons un paragraphe en bas de cette page.

Nombreux sont les sommets qui, au pléniglaciaire de la Glaciation Maximum, émergeaient de la surface de ce glacier du Paillon. Parmi ceux-ci, on peut citer, liste non limitative :

      • La Cime de l'Autaret, à l'altitude de 1308 mètres, qui émergeait d'une centaine de mètres de la surface glaciaire.

      • la Tête de Chien, sur Beausoleil, à l'altitude de 550 mètres, qui se situe à 1030 mètres du rivage actuel.

        Ce dernier sommet, dont la surface est peu inclinée, sont des sites SGT (c'est-à-dire des surfaces crées par la gélifraction et le transport des débris par un glacier), dont la surface se situe à l'altitude du glacier lors de du pléniglaciaire de la Glaciation Maximum.

      • enfin pour terminer cette liste, le plus remarquable, le Mont Férion, à l'altitude de 1411 mètres.

Les versants de certains sommets émergents présentent parfois, comme ceux des vallées, des ravinements creusés par les eaux glaciaires latérales. Le nombre de ceux-ci, ainsi que leur taille, diminuent lorsqu'on descend vers l'aval le glacier du Paillon. En effet, une partie de plus en plus importante du débit de ces eaux amenées par les glaciers affluents à celui du Paillon a déjà gagné le fond d'auge tout au long de son trajet.

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Les confluences du glacier du Paillon avec les glaciers voisins

En ce qui concerne le glacier du Var, on pourra se reporter à notre page sur le glacier du Var où nous avons étudié le tracé de ce glacier jusqu'à sa rencontre avec celui du Paillon.

La confluence du glacier du Paillon avec le glacier de la Roya

Pour situer la confluence de ces deux glaciers, nous avons utilisé également de manière approfondie les altitudes fournies par la méthode des délaissés morainiques. Notre étude a été effectuée en utilisant les cartes Géoportail ; elle a porté sur une trentaine de délaissés morainiques, dont certains seulement sont indiqués sur la carte Géoportail ci-dessous à l'échelle du 1/136 440, plus lisible que celle au 1/8528.

Altitude des délaissés morainiques au col de Turini (Alpes Maritimes)

Les valeurs numériques indiquées sur la carte donnent l'altitude de surface du glacier au-dessus des délaissés glaciaires indiqués dans la suite du texte par leurs coordonnées W3W. La méthode des délaissés morainiques utilisée ici permet de définir à quelques mètres près le niveau de surface des glaciers lors du maximum du pléniglaciaire de la Glaciation Maximum.

L'étude détaillée des altitudes fournie par ces divers délaissés morainiques nous a permis de tirer les conclusions suivantes, résumées succinctement ici :

      • Le glacier de la Roya prenait naissance vers 1800 m dans le cirque de vallées qui entoure le col de Tende, en dehors de la carte,

      • Le glacier de la Bévéra prenait naissance vers 2000 m sur le versant sud-ouest de l'Authion puis passait sur Moulinet,

      • Un autre glacier prenait également naissance sur le versant nord de l'Authion. Ce glacier descendait le vallon de Caïros jusqu'à rejoindre le glacier de la Roya à la Lagouna, à 1185 m (W3W arrimer.goûtons.vivante).

      • Sur le versant est de l'Authion, un glacier descendaient le vallon de la Maglia avant de rejoindre, lui aussi, le glacier de la Roya à La Maglia à 992 mètres d'altitude (W3W aérer.horaire.formatrice). Les glaces de la branche sud de ce glacier passaient au-dessus de Breil-sur-Roya, où elles rejoignaient le glacier de vallée à 1065 m d'altitude, sur le col d'Agnon (W3W entassement.profiter.rêvasser).

      • En amont de Fontan, les pentes des versants sont très souvent supérieures à 45°. Les glaciers qui les recouvraient étaient donc des chutes de séracs, en particulier dans le vallon de la Ciavondola, dont on a vu plus haut qu'elles ne peuvent donner naissance à des délaissés morainiques.

En aval de Breil-sur-Roya, sur lequel le délaissé glaciaire du col d'Agnon nous fournit une altitude de 1065 m, le glacier de la Roya, alors que son cours principal descendait la vallée actuelle, envoyait une diffluence passer par le col de Brouis (altitude actuelle 879 m), puis par le col du Pérus (altitude actuelle 659 m).

Au sommet du Mont Agaisen, qui domine Sospel (hors carte), un délaissé glaciaire nous fournit une altitude du glacier de la Roya de 750 m (W3W géant.regrouper.citation).

Quant au glacier de la Bévéra, après avoir, en aval de Moulinet, descendu la vallée, il perdait brutalement de l'altitude en passant sur les gorges de Notre-Dame de la Ménour, au prix également d'une probable chute de séracs.

À la confluence entre le glacier de la Roya et celui de la Bévéra, le plus important des deux était celui de la Bévéra. En effet, les glaces originaires de la Roya provenaient d'une diffluence qui devait franchir successivement deux cols, celui de Brouis et celui du Pérus, et leur débit était donc moindre que celui de la Bévéra, glacier de vallée qui ne rencontrait pas d'obstacle dans son parcours. Nous pensons donc que la confluence entre le glacier de la Bévéra et celui de la Roya avait lieu dans les environs de Sospel, à une altitude de l'ordre de 750 m et c'est là que nous fixerons la limite Est du glacier du Paillon ainsi que l'altitude de sa surface.

Après sa rencontre avec le glacier de la Roya, entre l'Escarène et Peille, le glacier du Paillon recevait les apports de plusieurs petits glaciers descendus de la chaîne frontalière. Reflétant la complexité du relief dans cette zone, le tracé de ces glaciers était assez compliqué. Nous nous contenterons ici de signaler leur existence, mais nous reviendrons sur ce sujet plus bas dans cette page.

La rencontre du glacier du Paillon avec les trois chaînons définis plus haut

Voici d'abord le premier de ces chaînons, celui du Brausch.

Le chaînon du Brausch

Le sommet du Brausch, à 432 m d'altitude est le point culminant de ce chaînon. On constate que le versant nord du Brausch comprend une surface couverte de points verts, peu visibles sur la carte suivante, qui, selon la terminologie de l'IGN, est une zone de graviers ou galets (voir notre page sur les délaissés morainiques). Ce "délaissé morainique", puisqu'il s'agit bien de cela, s'élève à l'altitude de 418 m (W3W renouer.éteinte.hiver).

Le Chaînon du Brausch dans les Alpes-Maritimes

Le Chaînon du Brausch dans les Alpes-Maritimes

Ce délaissé est le vestige d'une moraine latérale datant du pléniglaciaire de la Glaciation Maximum. Il nous montre que l'altitude de surface du glacier était, près du sommet du Brausch, de l'ordre de 418 mètres ou un peu plus, compte tenu des légers tassements survenus ultérieurement.

Après avoir franchi le chaînon du Brausch, le glacier du Paillon rencontrait, au fil de sa descente, le deuxième chaînon, celui du Plateau Tercier-Cime de la Caussiniera.

Le chaînon Plateau Tercier-Cime de la Caussiniera

La carte Géoportail au 1/17055 nous montre sur ce plateau, plusieurs zones couvertes de points verts, c'est-à-dire de délaissés morainiques, anciennes moraines demeurées en place après la disparition des glaciers. Sur cette carte figure également le vallon de Laghet.

Le vallon de Laghet entre le chaînon Plateau Tercier-Cime de la Caussiniera et celui de la Grande Corniche

Le vallon de Laghet dans les Alpes Maritimes

La carte au 1/8528 nous montre encore plus distinctement, au nord du Plateau Tercier, la zone de délaissés morainiques qui cerne le sommet du plateau, et s'élève à quelques mètres sous ce sommet.

Le plateau Tercier dans les Alpes Maritimes

L'altitude de la surface glaciaire au pléniglaciaire de la Glaciation Maximum était donc ici égale ou légèrement supérieure à celle de la partie supérieure de la zone à petits disques verts, soit, compte tenu d'un léger tassement postglaciaire, à 563 mètres environ sur le sommet du plateau Tercier (W3W réveil.remplir.palmier).

Une vérification peut être effectuée à l'aide des vues aériennes Géoportail. La vue suivante couvrant la même zone que la carte IGN ci-dessus confirme que le Plateau Tercier est couvert de délaissés morainiques. Ceux-ci sont reconnaissables à leur végétation rabougrie, ainsi qu'à la présence de nombreuses pierres apparentes. On distingue même, à gauche de la photo, un clapier avec des arbres en son centre, relief typiquement glaciaire. Voir à ce sujet nos pages sur l'érosion karstique et les clapiers et divers types de délaissés glaciaires.

Le plateau Tercier dans les Alpes-Maritimes
Le plateau Tercier dans les Alpes-Maritimes

Quant aux eaux glaciaires latérales, qui, au nord du Plateau Tercier, s'écoulaient 150 mètres sous la surface du glacier, c'est-à-dire aux environs de 400 mètres, nous pensons qu'elles devaient rejoindre la vallée du Paillon et participer à son creusement.

Le chaînon de la Grande Corniche

La carte du vallon de Laghet rappelée ci-dessous nous montre qu'il existe également des délaissés morainiques sur le versant nord du dernier chaînon, celui de la Grande Corniche, preuve que le glacier du Paillon s'est étendu au moins jusque là lors de la Glaciation Maximum.

Le vallon de Laghet entre le chaînon Plateau Tercier-Cime de la Caussiniera et celui de la Grande Corniche

Le vallon de Laghet dans les Alpes Maritimes

Notre méthode des délaissés morainiques nous a permis de préciser le contact du glacier avec la crête du Parc Forestier Départemental de la Grande Corniche, que nous appellerons dans ce qui suit « la Grande Corniche ».

Sur cette crête, on relève en effet la présence de nombreux délaissés morainiques. Par exemple, sur quelques mètres à l'ouest de l'Observatoire, leur altitude est de 610 mètres comme à l'est de la Simboula, où ces délaissés atteignent la crête. Parcourant cette crête vers l'est, nous rencontrons au sommet de la Simboula (W3W pochette.cartable.croyons), un délaissé morainique à 676 mètres d'altitude qui nous indique que le glacier du Paillon a atteint et même dépassé cette altitude lors du pléniglaciaire de la Glaciation Maximum.

Plus à l'est encore, l'arête porte des délaissés morainiques sur son versant nord. De même à l'ouest du Fort de la Revére, où ceux-ci s'élèvent jusqu'à 680 mètres. A l'est de la Simboula, ils parviennent à la crête sur une longueur de plus d'un kilomètre jusqu'à la Cime de la Forna, à 621 mètres d'altitude. Enfin, encore plus à l'est, le versant nord du Mont de la Bataille porte des délaissés morainiques jusqu'à son sommet, à 620 mètres.

Notre conclusion est donc la suivante : le glacier du Paillon est parvenu à l'arête du chaînon de la Grande Corniche, à une altitude égale ou supérieure à 680 mètres, et les couches supérieures du glacier ont pu le franchir sous une épaisseur de quelques dizaines de mètres. Nous verrons quelques lignes plus loin sur cette page comment il est possible de déterminer lors de quelle glaciation c'est produit ce franchissement et son ampleur.

Les glaces qui franchissaient la crête de la Grande Corniche s'accompagnaient de roches emportées à la surface du glacier, qui se sont déposés dans le versant sud de celle-ci, cependant que les blocs de glace et leurs eaux de fonte y creusaient des vallons.

Entre le chaînon Plateau Tercier / Cime de la Caussiniera et celui de la Grande Corniche, le vallon de Laghet a été, selon nous, creusé par les eaux glaciaires latérales du glacier du Paillon, pendant les périodes où l'altitude de celui-ci était voisine de 660 mètres, c'est-à-dire pendant tout le pléniglaciaire de la glaciation qui a atteint la crête la Grande Corniche. Cette longue période d'écoulement des eaux a donc permis de creuser ce vallon de Laghet profond de 200 mètres.

Nous verrons à la fin de cette page quel était le sort étonnant de la glace du glacier du Paillon après qu'elle ait franchi la crête de la Grande Corniche.

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Quelques sites remarquables du glacier du Paillon

Tout d'abord, le Mont Férion

Ce sommet se situe à l'ouest, pourrait-on dire, du glacier du Paillon, entre Lévens et Coaraze. Le délaissé morainique le plus élevé existant sur le Mont Férion se situe à quelques mètres du sommet, à 1401 mètres (W3W boisson.relevons.grouper). Cette altitude peut sembler contradictoire avec des altitudes plus faibles relevées quelques kilomètres en amont du glacier du Paillon, tel que, pour n'en citer qu'un, la crête de la Madone d'Utelle à 1141 mètres (W3W agissons.impôt.sauvons). Un glacier ne peut pas remonter en suivant son cours ! Nous pensons donc que le Mont Férion possédait son propre glacier et que c'est l'altitude atteinte par celui-ci tout au long de sa face sud qu'indiquent les délaissés morainiques.

Entre le délaissé morainique du sommet du Mont Férion, à 1412 mètres d'altitude et celui de l'extrémité nord de la Barre de Lendre à Colla Bassa, à 879 mètres, la distance de 3940 mètres qui les sépare montre que le glacier qui les a créés présentait ici une pente voisine de 19,5 %.

Plus bas sur cette arête sud, la méthode des délaissés morainiques permet de calculer une pente de 6,7 %. Plus bas encore, la pente devient encore plus faible avant la confluence de ce glacier du Mont Férion avec le glacier de vallée du Paillon à peu près sur une ligne Châteauneuf-Villevieille/Berre-les-Alpes, passant légèrement au nord de Contes.

Pour donner un exemple d'un site similaire, nous pensons que le Mont Férion ressemblait, avant diminution du niveau des glaciers et à une échelle réduite, à l'actuel Mont Cook vu ci-dessous :

Le Mont Cook en Nouvelle-Zélande

photographie Guillaume Dargaud
Le Mont Cook en Nouvelle-Zélande

Comment peut-on déterminer lors de quelle glaciation et sous quelle épaisseur de glace le glacier du Paillon a franchi le chaînon de la Grande Corniche lors de la Glaciation Maximum ?

Au cours des pléniglaciaires des deux glaciations 16 et 12, deux périodes de temps pendant lesquelles le niveau des glaces était sensiblement stationnaire, la stabilité du niveau des glaces a cependant permis la création, sous la chaîne frontière franco-italienne, des deux corniches de Plan de Lion et de Fin de Loge évoquées ci-dessous.

Nous avons utilisé pour cela la présence de deux banquettes que l'on rencontre au-dessus de Castellar (Menton, Alpes-Maritimes), à peu de distance en dessous de la frontière avec l'Italie. Ces deux banquettes sont :

      • la banquette de Fin de Loge,

      • la banquette de Plan de Lion,

      • et, un peu à l'écart sur le versant sud-ouest du Mont Ours, la banquette de Lujerneta.

Les deux premières banquettes sont des éléments mineurs du paysage, difficiles à distinguer dans le relief tourmenté environnant.

Les banquettes de Castellar dans les Alpes-Maritimes
Image sensible au passage de la souris

Voici les caractéristiques de ces deux banquettes :

      • Banquette de Fin de Loge : longueur 400 mètres largeur 90 mètres

        Elle s'allonge depuis le point de coordonnées W3W vigneron.pétiller.griotte, d'altitude 640 mètres, jusqu'au point de coordonnées W3W concertation.applicateur.blagueur d'altitude 631 mètres.

      • Banquette de Plan de Lion : altitude de l'extrémité sud 748 mètres en (W3W fumer.démarrant.goûter).

        Large de 90 mètres, elle s'allonge du point de coordonnées W3W copiste.songeur.individuel, d'altitude721 mètres, jusqu'au point de coordonnées W3W paginer.étions.dégivreur, d'altitude 718 mètres sur une longueur de 1000 mètres. Cette quasi horizontalité a permis d'y tracer une piste.

Leur horizontalité, leur largeur et leur proximité nous montrent qu'il s'agit là de deux surfaces créées par la gélifraction et le transport par un glacier (érosion GT) au cours de deux glaciations successives. De plus, la galerie de Plan de Lion se trouve plus au sud que celle de Fin de Loge, donc plus près de la terminaison du glacier.

Selon le schéma habituel, c'est la Glaciation Maximum du stade 16 qui a donné naissance à la corniche la plus élevée, celle de Plan de Lion alors que la corniche de Fin de Loge a été créée lors de la glaciation du stade 12. Leur différence de niveau d'une centaine de mètres est d'ailleurs égale à celle que nous avons rencontrée à chaque fois que nous avons comparé les altitudes des glaciers du stade 12 et du stade 16 près de leurs extrémités. C'est donc lors de la Glaciation Maximum, que les glaces du glacier du Paillon ont franchi l'arête de la Grande Corniche et sont descendues dans son versant sud.

Pour terminer, voici le site le plus caractéristique du glacier du Paillon, la chute de séracs de la Côte d'Azur.

Nous venons de voir ci-dessus que le glacier franchissait la crête du chaînon de la Grande Corniche sous une épaisseur de quelques dizaines de mètres, lors de la Glaciation Maximum. Or, la face sud de ce chaînon, qui s'étend jusqu'à la Méditerranée, présente une pente accusée : pratiquement sur sa totalité, la pente se situe à des valeurs largement supérieures à 10%. Sur des pentes aussi fortes, un glacier ne peut s'écouler que sous la forme d'une chute de séracs. Les amas de roches que l'on trouve par endroits dans ce versant ne sont donc pas des délaissés glaciaires, mais des dépôts de rochers entraînées en même temps que les blocs de glace puis déposés sur des reliefs favorables.

Nous citerons entre autres :

      • Un dépôt de rochers à Lou Seuil (W3W voisin.barbe.patinage), à l'altitude 297 mètres, sur la Pointe de Cabuel, à 300 m du rivage actuel,

      • sous La Plana, un dépôt de rochers à 224 m d'altitude (W3W témoin.rôtir.année), à moins de 700 mètres du rivage actuel,

      • sous la Tête de Chien, un dépôt de rochers à 243 mètres d'altitude, à 700 mètres du rivage actuel (W3W étape.agripper.lavoir).

Plus près encore des vagues, voici :

      • les Bondes, sous Eze Bord de Mer, à 74 m d'altitude et à 20 m du rivage actuel (W3W pourquoi.remerciant.autour).

Et, également sous Eze Bord de Mer, un autre dépôt, À l'abri d'une petite falaise,à une altitude de 86 m (W3W racontant.exprimons.adorant)

Tous ces dépôts sont de petites dimensions, bien inférieures à celles des délaissés morainiques situés en amont sur le glacier, tels que, pour n'en citer qu'une, la moraine terminale du plateau Tercier / Cime de La Caussinièra.

Enfin, peut-on imaginer qu'un glacier régénéré ait existé après la chute de séracs du versant sud de la Grande Corniche, comme cela se produit parfois ? L'examen de la partie est de la carte du littoral avec profondeurs ci-dessous ne nous permet pas de répondre à cette question. Si toutefois un tel glacier a existé, les traces de son passage ont été certainement recouvertes par les sédiments provenant du Var.

Carte littorale de Nice avec les profondeurs marines

Quelles étaient les dimensions de cette chute de séracs de la Côte d'Azur ?

À l'ouest, elle débutait entre Nice et Villefranche-sur-Mer, sensiblement sur le Mont Alban. À l'est, elle s'étendait jusqu'à la frontière avec l'Italie. Les cartes italiennes moins détaillées que les cartes françaises, ne nous permettent pas de savoir si elle se continuait au delà en Italie. La chute de séracs de la Côte d'Azur affectait donc le versant sud de la Grande Corniche sur une longueur d'environ 20 kilomètres et sur une hauteur de l'ordre de 700 mètres.

On pourrait donc imaginer ce que donnerait une telle chute de séracs, en se basant sur l'actuelle chute de séracs du glacier de Verra en Italie, beaucoup moins importante.

Une chute de séracs sur le glacier de Verra en Italie

Spectacle unique au monde, mais spectacle sans spectateurs, quoique ...

... quoique la datation récente d'un morceau de mâchoire humaine sur les hauts plateaux du Tibet a montré que celle-ci appartenait à un dénisovien qui vivait il y a 160 000 ans, c'est à dire au cours de la glaciation du stade 6, bien postérieure à la Glaciation Maximum. Et le Tibet est si proche de la Côte d'Azur pour un Ötzi aventureux !

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Mise à jour le Lundi, 20 Juillet 2020 18:05